20 octobre 2005

MEURTRES AVEC BARBARIE : LE DOSSIER INTERDIT (CHRIS VS LA BUREAUCRATIE TOME 1)

Préface

Loin de moi l’idée de vouloir entretenir quelque mythe que ce soit à propos de la bureaucratie et des fonctionnaires de la poste ou d’ailleurs. Pour prouver ma bonne foi, je déclare cette série de billets placée sous le signe de l’honnêteté intellectuelle et de la rigueur journalistique. Voici donc les faits bruts.

Le ciel d’un gris poussière et suie s’étendait à l’infini au dessus de la ville et les quelques rayons de lumière fatigués qui arrivaient jusqu’au sol n’apportaient aucune chaleur. L’Ecole se dressait devant moi, béton parmi le béton. Sans doute l’architecte avait-il voulu égayer la façade en y faisant tailler cette fresque, mais j’avais pour ma part du mal à établir un lien logique entre ces braves gens langoureusement étendus dans leur plus simple appareil et la gloire que les Télécommunications répandaient indubitablement sur le monde. Un vrai malade cet architecte. Imaginez un lieu où toutes vos peurs deviendraient réelles. Un lieu où le hall d’entrée se situerait à l’étage 2, un lieu où l’étage 5 d’un bâtiment correspondrait directement avec l’étage 1 d’un autre. Nombreux furent ceux qui tentèrent de sortir des chemins connus, les fous. Beaucoup ne revinrent jamais , mais peut-être étaient furent-ils les plus chanceux. Les survivants revenaient décharnés, leurs vêtements en lambeaux, et n’étaient plus jamais les mêmes. On les soignait bien sûr, on reconstruisait ce qui pouvait l’être, mais quelque chose en eux était mort. Leurs regards fixes portaient bien au delà du monde qui les entourait. Ils en avaient trop vu. Après quelques temps, certains arrivaient de nouveau à effectuer des actions simples, et même à porter des petites charges. Mais aucun ne parlait plus jamais. Des rumeurs parlaient d’affreuses créatures vivant dans les entrailles de l’Ecole, de sacrifices humains au dieu « Provo », ou même de practices de golf sataniques, mais ceux qui tenaient à leur santé mentale se gardaient bien d’aller vérifier. Voilà donc l’endroit où j’allais donc pénétrer. Cerberus, le sympathique vigile, inclina la tête à la vue de la carte d’étudiant VIP que je lui présentais, et reprit avec un air de délectation le passage à tabac d’un première année, sans doute pas assez prompt à sortir sa carte. Sélection naturelle, me dis-je avec un léger sourire. A la fin, il ne devait en rester qu’un. Mais déjà mes pensées étaient tournées vers une autre direction. Aujourd’hui, j’allais engager une lutte à mort avec un ennemi d’une toute autre envergure. Aujourd’hui, j’allais affronter Franzou, le Maître des Paperasses. Tout en gravissant le large escalier de marbre blanc, j’essayais d’envisager toutes les solutions, pour maximiser mes chances de survie. Franzou était du genre retors et minutieux, spécialiste des coups portés de façon chirurgicale, et il adorait faire souffrir. Issu d’une longue tradition de bourreaucrates, il l’avait perpétuée et enrichie de nouvelles trouvailles sadiques d’une cruauté infinie. C’était du suicide. Ma seule chance était de le prendre par surprise. L’égorger avant qu’il s’aperçoive de ma présence, le regarder se noyer dans son sang puis m’en asperger en piétinant frénétiquement son cadavre encore chaud. Bon plan. Il fallait que ça marche. Sixième étage, la tension devenait oppressante. Tout un couloir à traverser, chaque porte ouvrant sur un monde de lamentations et de tortures sans fin. Mes papiers tirés au clair, j’avançais, sans un bruit. Au loin, l’antre de la bête se dessinait, ses contours encore flous. Progressant toujours dans la pénombre, mon pied butta sur quelque chose. Un corps, atrocement mutilé. Prisca. Ils me le paieraient ! Mais pas maintenant, pas comme ça. Le temps me fuyait entre les doigts, et j’avais une mission à accomplir. Oubliant ma douleur, je repris ma lente progression, m’enfonçant toujours plus dans la pénombre. A quelques décifurlongs du bureau satanique de la bête, une odeur méphitique emplît l’air. Il était là. Par chance, je pouvais maintenant le voir, sa porte était ouverte. Cela me permettrait de lui sauter à la gorge sans avoir à m’annoncer en défonçant la porte. L’espoir grandît dans mon esprit, mais pas au point de supplanter la peur. J’avais l’estomac noué. Je marquais un dernier arrêt dos au mur, à coté de l’entrée, le temps de rassembler mon courage. Et c’était parti. D’un bond, j’étais au centre de la pièce, mon dossier à double tranchant prêt à émincer du Franzou. Mais rien, personne. Quelle était donc cette diablerie ? La porte claqua derrière moi, et il était là, comme né de l’obscurité même, arborant un air plus cruel que jamais.

« Tu n’aurais pas dû venir, Chris. Houhou, grand fou que tu es ! Tu vas souffrir mille morts, mon coquinou, et personne ne pourra rien pour toi.

- Arrière, créature. Je suis venu pour te faire expier tes crimes passés, et je jure par Le Monster Daron que tu les expieras. Tu imploreras mon pardon dans ton dernier râle.

- Ouhlàlà mais que tu es agressif, mon chou. Crois moi, j’en ai fouetté des plus coriaces que toi. Implore ma pitié.

- Tu sais où tu peux te la mettre ta pitié ?

- Viens me l’y mettre, je t’en prie.

- Nous ne règlerons pas cela par les mots. En garde ! »

Dans un feulement rauque il se jeta sur moi, toutes griffes dehors. Mais j’avais prévu la manoeuvre. D’un coup de pied bien placé je prolongeais sa course jusqu’au mur sur lequel il vint s’écraser. Il se releva avec un hurlement de folle rage, mais déjà j’avais manœuvré pour renforcer ma position. Mon dossier de demande de dossier fendit l’air pour s’écraser là où s’était trouvé son crâne une seconde plus tôt. Il était rapide, et furieux qui plus est. Il me fallait gagner rapidement, ou je sentais que j’aurais le dessous. Tout crocs, griffes et écailles, il lança une nouvelle charge, puis une autre. Mon dossier virevoltait dans l’air, parant tant bien que mal les coups rageurs qu’il tentait de m’asséner. Une douleur lancinante au bras gauche se fît soudain sentir : il m’avait planté une griffes dans la chair. C’était le moment de tenter une manœuvre folle, ou périr. Au lieu d’essayer de m’éloigner comme il s’y attendait, je me jetais à corps perdu sur la bête, dans une étreinte finale. D’un coup sec, mon dossier de demande de dossier de demande de bourse pénétra dans sa gorge, libérant un torrent de sang sombre dans un craquement. Je pouvais lire la terreur dans ses yeux cruels, il se débattait, tentait de hurler, mais déjà sentait la vie l’abandonner.

« Rendez-vous en enfer, Franzou. »

D’un coup sec, j’achevais de séparer sa tête de son corps. C’était fini. Je me dirigeais vers sa réserve secrète, prendre ce que j’étais venu chercher. Ma bonne vieille demande de demande de bourse émoussée était désormais inutile. Elle m’avait bien servi, mais j’avais maintenant entre mes mains maculées de sang une arme incroyablement plus puissante. Seules quelques unes avaient survécu à la grande destruction qui avait précédé notre ère, et celle là reposait entre mes doigts. Une demande de bourse. Avec cette arme, rien ne pourrait m’arrêter. J’étais invincible ! Mais une douleur dans mon bras gauche vint me rappeler à quel point j’étais passé près du désastre. Ne jamais baisser sa garde. Quelques libations avec le sang tiède de mon ennemi, et je repartais vers des lieus plus cléments. Etait-ce la fin ? Seul Be-sak’ le Grand aurait pu le dire. Du moins était-ce une FIN


Bientôt dans la même collection : MASSACRES ET ATROCES MUTILATIONS : LA GRANDE QUESTE DU RIB (CHRIS VS LA BUREAUCRATIE TOME 2)

3 commentaires:

Anonyme a dit…

description précise et détaillée d'un des lieux le plus sordide malsain et infecté par les rats du XIIIème. Un relicat des âges sombres. L'auteur nous entraine dans ces marais-mouvants jusqu'à la gorge. A lire absolument.
**** Telerama

Anonyme a dit…

Une histoire envoutante, une précision chirurgicale dans les descriptions. Le lecteur est submergé d'émotion à chaque instant. On s'y croirait. C'est la découverte de l'année.
(coeur) (coeur) (coeur)
Le Nouvel Observateur

Anonyme a dit…

Certains blogs feraient bien de s'inspirer du billet de la symétrie hermitienne.
**** Le Dauphiné libéré